Ces virus qui font le bien

Et oui ça existe ! A première vue, on pourrait croire que c’est quelque chose d’inimaginable, mais on a depuis longtemps utilisé certains virus pour combattre des infections bactériennes. Le nom de ce procédé est la phagetherapy (ou phagothérapie pour les anglophobes). 

Attaque des virus sur les cellules.

Comme dit précédemment, cette technique ne date pas d’hier. Revenons en arrière en 1915 lorsque Frederick Twort remarque que certaines microcoques, des bactéries de forme ronde, après destruction, prennent un aspect vitreux et que cette caractéristique était transmissible à d’autres par simple contact. 

Frederick Twort

Puis en 1917, Félix d’Hérelle, ancien chocolatier (comme quoi tout est possible en termes de reconversion), arrive à observer l’attaque de virus (plus précisément d’ultravirus) contre des bactéries, éliminant ainsi les infections que ces dernières peuvent avoir sur les organismes. 

Félix d’Hérelle

Ainsi est née la notion de phagetherapy. Cependant, il faudra attendre le milieu du XXe siècle pour voir débuter des travaux de recherches sur ces virus à bactéries. C’est durant cette période que les pays de l’Europe de l’Est (Russie et Georgie notamment) investissent dans ce domaine prometteur. A contrario, les pays occidentaux ne voient pas l’intérêt d’étudier ce mécanisme, vu qu’ils travaillent sur les antibiotiques suite à la découverte de la pénicilline. La recherche est assez rudimentaire, les chercheurs récupèrent des eaux usées venant des hôpitaux et tentent de trouver des bactériophages. Seulement les résultats sont peu présents. Aujourd’hui la recherche continue, espérons que cela mène à de nouveaux résultats.

Mais du coup comment marche le principe de la phagetherapy ? Il faut d’abord savoir comment fonctionne un virus. Généralement, un virus est vu comme une structure avec une tête (la capside, renfermant l’ADN ou l’ARN selon le virus), un corps et des « pattes ». 

La particularité des virus est de contenir dans leur capside toute leur information génétique, soit sous forme d’ADN, soir sous forme d’ARN.

Le virus pour se multiplier vient s’accrocher sur la cellule et y insère son matériel génétique. Une fois à l’intérieur, les acides nucléiques vont utiliser la machinerie cellulaire de l’hôte pour être transcrit et traduit, c’est-à-dire pour être répliqué et lu. A la lecture de ces composants génétiques, de nouveaux virus (virions) vont être produits. Cette production une fois finie, la cellule hôte va être lysée et les virions vont pouvoir sortir et ainsi aller infecter d’autres cellules, etc, etc. Bien évidemment, la cellule une fois lysée cesse de fonctionner. C’est sur ce principe que se base la phagetherapy. Ce qu’il faut savoir c’est que les virus sont spécialisés, c’est-à-dire qu’ils ne vont infecter qu’un type cellulaire en fonction du virus. L’exemple le plus commun est le bactériophage T4 s’attaquant à E. coli

Le phage T4 est le prédateur de la bactérie E. coli.

De plus, la phagetherapy possède des avantages face aux antibiotiques. Les virus étant naturels, ils ne nécessitent pas de coup de fabrication, il suffit de les multiplier pour en produire en grande quantité. De plus lors des essais sur l’homme, il n’a pas été observé d’effets secondaires, limitant les risques sur la santé. Enfin, l’utilisation d’antibiotiques en trop grande quantité rend les bactéries résistantes à ces derniers, alors que les phages, même s’ils provoquent le même effet, s’adaptent aux résistances et permettent de combattre continuellement l’infection. Cependant il ne faut pas complètement supprimer les antibiotiques. Il faut plus penser à utiliser les deux conjointement. En premier lieu l’utilisation de phages permet de diminuer considérablement la quantité de bactéries présente dans l’organisme. L’utilisation dans un second temps des antibiotiques permet d’éliminer le reste des bactéries en évitant leur mutation vers une résistance à ce dernier et aussi la transmission de la résistance si elle s’est créée.

Les phages démontrent donc leur intérêt dans la lutte contre les pathologies bactériennes. C’est une méthode sûre qui mérite qu’on s’y intéresse d’avantage. Il ne reste plus qu’à attendre les résultats de la recherche sur ces micro-organismes.